Quelles sont les limites de la liberté d’expression des salariés sur Internet ?
Expression du salarié sur Internet
La liberté d’expression, fondement de nos sociétés démocratiques, est consacrée par de nombreux textes ; article 10 de la convention européenne des droits de l’homme, article 11 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Chacun sait que le contrat de travail peut restreindre les libertés individuelles et collectives et les droits des personnes qu’à la stricte condition que ces restrictions soient justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.
Le droit d’expression des salariés est renforcé par l’article L. 2281-1 du Code du travail qui leur accorde le bénéfice d’un droit à l’expression directe et collective sur le contenu, les conditions d’exercices et l’organisation de leur travail.
L’article L. 2281-3 du Code du travail protège les salariés des sanctions et licenciements fondés sur les opinions que les salariés émettent dans l’exercice du droit d’expression.
Mais cette liberté d’expression n’est pas absolue, et la Cour de cassation juge que l’exercice de la liberté d’expression peut constituer une faute s’il dégénère en abus.
L’abus est caractérisé par l’utilisation de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, définition qui offre donc une marge d’appréciation relativement importante aux juridictions.
Les règles sont strictement identiques en matière d’expression sur internet.
La Cour de cassation vient de rendre une décision en ce sens.
Il s’agissait d’un électricien licencié pour faute grave pour avoir indiqué sur un site internet dénommé « miroir social » que l’un de ses collègues de travail avait été sanctionné pour « avoir soi-disant mal répondu à son chef d’équipe, motif monté de toutes pièces », ou encore que lui et ses collègues avaient subi « chantage et menaces déguisées ».
La Cour d’appel de Rennes avait jugé que les propos tenus par le salarié ne caractérisaient pas un abus de la liberté d’expression et avait considéré que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.
La Cour de cassation rappelle que l’exercice de la liberté d’expression des salariés en dehors de l’entreprise ne peut justifier un licenciement que s’il dégénère en abus.
Elle ajoute que la Cour d’appel, a exactement retenu que le fait pour un salarié de s’interroger, dans le cadre d’une situation de conflit et par la voie d’un site internet revêtant un caractère quasiment confidentiel, sur le licenciement de l’un de ses collègues, sans que les propos incriminés soient injurieux ou vexatoires, n’excédait pas les limites de la liberté d’expression.
Donc oui, juridiquement les salariés peuvent émettre des opinions positives ou négatives sur leur entreprise sur Internet, sous réserve que ces propos ne soient pas diffamatoires, injurieux, excessifs.