La fin des manquements de l’employeur « causant nécessairement un préjudice au salarié » ?
Qu’il s’agisse de l’absence de visite médicale, du retard dans la remise des documents sociaux ou encore de la nullité de certaines clauses du contrat de travail, la Cour de cassation jugeait que le salarié n’avait pas à démontrer un préjudice particulier.
La formule lapidaire de la Cour de cassation était de considérer que de tels manquements causaient nécessairement un préjudice au salarié.
Mais, la position de la chambre sociale n’était pas en phase avec celles des autres chambres qui donnent au pouvoir du juge du fond « d’apprécier souverainement le montant du préjudice en fonction de l’évaluation qu’ils en font ».
Autrement dit, les juges du fond font ce qu’ils veulent (dans la limite du préjudice symbolique), mais ils doivent tout de même évaluer un préjudice qu’il faut donc caractériser….
Une décision rendue le 13 avril 2016 destinée à être publiée au rapport de la Cour de cassation, marque un durcissement de la chambre sociale.
L’histoire est la suivante, un salarié demande des dommages et intérêts car il aurait reçu tardivement plusieurs documents : certificat de travail, bulletin de paye.
Plus précisément, ces documents ont été remis par l’employeur devant le bureau de conciliation et d’orientation.
Le Conseil de Prud’hommes a rejeté la demande du salarié, estimant qu’il s’agissait de documents quérables (le salarié devait se déplacer à l’entreprise pour les réclamer) et que le salarié ne rapportait aucunement la preuve d’un préjudice.
Pourvoi en cassation (la décision n’était pas susceptible d’appel) du salarié.
Contre toute attente, le pourvoi est rejeté.
La cour de cassation juge que l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond ; que le conseil de prud’hommes, qui a constaté que le salarié n’apportait aucun élément pour justifier le préjudice allégué, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Elle calque ainsi sa jurisprudence sur celles des autres chambres de la Cour de cassation et signe un retour à une plus grande orthodoxie juridique.